En Médiation, un litige peut être résolu en quelques heures.

Derrière un recours contre un permis de construire peut se cacher une crainte, une guerre entre voisins ; la question de sa légalité n’est alors qu’un prétexte selon Karelle Diot.

La présidente d’Horizon Médiation, association fondée en février 2022, explique l’intérêt pour les parties à un litige de faire appel à un tiers neutre, impartial et indépendant pour régler leurs différends.

Pourquoi avoir créé une association dédiée à la médiation ?
En 2021, j’ai suivi une formation sur le mode de règlement amiable des différends avec une dizaine d’autres avocats et juristes. A l’issue de cette année d’études, l’idée a germé de mettre en commun les compétences acquises et de créer une structure dédiée à la médiation pouvant intervenir dans tous les domaines du droit (famille, travail, urbanisme…). L’association propose des co-médiations avec deux médiateurs, l’un compétent dans la matière objet du litige, l’autre non. Ce binôme est ainsi à même de réaliser une supervision en temps réel, indispensable pour éviter de faire du droit, ce qui n’est pas l’objectif de la médiation.

Quel est l’intérêt de ce mode de règlement des différends pour un opposant à un projet de construction ?
Qu’elle soit ordonnée par un juge ou conventionnelle, la médiation est une opportunité pour les parties. Elle permet de mettre tous les points de désaccord sur la table et de régler le problème dans sa globalité. Les juges y sont de plus en plus favorables lorsqu’ils réalisent, en cours d’instance, que le recours n’est pas uniquement juridique, qu’il existe des problèmes sous-jacents, un trouble de voisinage par exemple. De plus, ce mode de règlement des différends peut permettre aux parties d’éviter de nombreuses années de procédure, et s’avérer moins onéreux qu’un procès. Un litige relatif à un permis de construire peut être résolu en quelques heures si les médiés parviennent à trouver une solution à leur désaccord.

Tous les litiges s’y prêtent-ils en matière d’urbanisme ?
La médiation peut être un outil efficace s’agissant des différends liés aux autorisations d’urbanisme. La question de la légalité ou non d’un permis de construire, sur laquelle se fonde généralement un requérant pour attaquer un permis, est bien souvent un prétexte. Derrière un recours peut se cacher une crainte, une guerre entre voisins. Lorsque la personne arrive à l’exprimer et que l’autre partie l’écoute, le conflit prend un autre visage et des solutions peuvent être trouvées. Peu importe finalement que l’autorisation soit légale ou pas. ALESSANDRO SILVESTRI / LE MONITEUR Derrière un recours contre un permis de construire peut se cacher une crainte, une guerre entre voisins ; la question de sa légalité n’est alors qu’un prétexte selon Karelle Diot.

La médiation est-elle alors la solution pour limiter les recours contre les permis de construire ?
Pas forcément. Ce mode de règlement n’est pas adapté à tous les contentieux de permis. Sur un recours intenté par un voisin contre un projet de construction en raison de la nature même du projet (immeuble collectif de logements par exemple), la médiation a peu de chances de réussir, car, dans cette hypothèse, le requérant craint une perte de jouissance de son bien ou une dévalorisation de celui-ci.

Un litige lié à un document d’urbanisme peut-il aussi être résolu par ce biais ?
Un PLU(i) étant un acte réglementaire, la médiation est plus compliquée, mais reste envisageable. Ici encore, il faut comprendre ce qui se cache derrière le recours. Si la personne conteste le PLU(i) parce que son terrain est devenu inconstructible, la médiation n’est pas adaptée. En revanche, si le recours émane d’une association soucieuse de protéger les intérêts qu’elle défend (nature, patrimoine), solliciter une médiation peut aboutir à un accord emportant son désistement. La médiation peut en effet permettre un travail collaboratif dans le cadre de la future évolution du PLU(i). L’intervention d’un tiers neutre et indépendant qui n’est pas là pour trancher mais pour donner la parole à chaque partie, peut constituer une solution pour dénouer de façon pérenne et globale des situations que le contentieux seul ne peut pas résoudre.

Interview Le Moniteur – Septembre 2022
Entretien avec Karelle Diot, avocate au barreau de Paris et médiatrice.


Urbanisme

Article du 2 septembre 2022

« En médiation, un litige peut être résolu en quelques heures »

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